-Lettre du 15 juin 1702 (d’Arnstatt) :« Je n’ai pu répondre à la dernière lettre de V. A., parce qu’elle n’est venue que dans le moment, que je fermais les miennes : du depuis j’ai un peu examiné la dissertation de Mr le Dr Bon, et ce qu’il a plu à V. A. d’écrire sur ce point, et explication du médaillon de Tibère. Quoique le tout soit bien raisonné, je n’y saurais pourtant pas trouver une conviction indubitable, et la supplie très humblement à considérer les raisons suivantes. I. Premièrement l’opinion de Mr le Dr Bon ne peut être approuvée tant pour la véritable lecture de la médaille, que pour le nom COLONIA PRIMA IVNONIA de Carthage, parce qu’il se lit distinctement PERMIS. P. CORNELI . DOLABELLAE. PROCOS. CP. CAS DD. Et le C. L. GAVIO CAS. N’y peut pas être, et si ces lettres s’y lisaient, ce serait une marque assurée, que le médaillon de Corraro a été mal réparé par une main moderne. Pour la nomination de Carthage, il me semble qu’on la peut aussi appeler PRIMA IVNONIA, que l’incomparable Venise PRIMA MARCIANA, et les dénominations des Panégyristes et poètes n’entrent pas dans les monuments publics ; cependant on a obligation à Mr le Dr Bon d’avoir trouvé le I après C.P. car sur le médaillon, dont je possède la colle, et qui est présentement à Berlin, on ne le saurait apercevoir. II. Cornelius Dolabella a été nommé au proconsulat d’Afrique A.V.C. 776 et il finit la guerre avec Tarsasinas l’année suivante pendant lequel temps Tibère était IMP. VIII. COS. III ainsi on ne peut douter que ce médaillon ne soit frappé en cette province, et la médaille de Drusus rapportée par Vaillant confirme lamême chose, puisqu’il s’y trouve ( ?)le procos. d’Afrique avec la tête du même Mercure. III. Ce médaillon ne peut être frappé dans la Dalmatie ou COLONIA PIETAS IVLIA parce que Dolabella n’y était que LEG. PROPR. et non Pro Cos. dans un temps que Tibère n’était pas encore COS. IIII. Il n’a pu être frappé in Lusitania, où était COLONIA PAX IVLIA, parce que cette province ne dépendait pas de l’Afrique, et avait dans le même temps un autre proconsul Q. Vibius Serenas, et l’inscription que cite Wolfg. Lazius n’appartient pas à ce P. Cornelius Dolabella, mais à son grand-père L. Cornelius Dolabella, lequel triompha A.V.C. 655 ex Hispania ulteriore de Lusitania, comme marque fort bien Pighius Tom. III et il ne faut pas s’étonner de la longueur du temps, car ces Dolabella ont sans doute vécu jusqu’à un grand âge, et le dernier P. Cornelius Dolabella a été consul A.V.C. 763 et pourtant il a encore vécu A.V.C. 800 à ce que dit Tacitus. IV. Je n’ai pas le Lexicon Geograph. de Ferrarius ou de Baudrand ( ?), et n’ai rien pu trouver de COLONIA PONTEZITA, pour apprendre si elle était assez considérable pour faire battre de la monnaie. Cependant il y a beaucoup de vraisemblance, que ce médaillon de Tibère y a été frappé, si on ne peut trouver autre colonie pour cela. S’il était permis de simplement deviner, on pourrait lire COLONIA PRIMA IVLIA, parce que Carthage est la première colonie que Jules César a établi, et peut-être que cela a été sa première dénomination ; il est cependant vrai que cela peut être trouvé ridicule parce que Carthage et Corinthe ont été établies en même temps, et que du temps d’Auguste cette colonie portait d’autres noms. Pour le reste de l’inscription CPCASSD, je confesse mon ignorance et n’en sais que dire. Voici deux inscriptions de Gruterus, que j’ai fait copier puisque V. A. n’a pas ce livre :
Repertum in PhysicaEpidauro ad Sardi
Montis indices,prope Saeclum D. Thomae
Anno 1547 ubi et fragmenta caput
Statuae repertum
P. CORNELIO
DOLABELLAE. COS
VII. VIRO EPVLON
SODALI TITIENSI
LEG. PROPR. DIVI AVGVSTI
ET TI. CAESARIS AVGVSTI
CIVITATIS. SVPERIORIS
PROVINCIAE. HILLYRICI
In Lusitaniea civitate Paixa, cippusin foro
L. AELIO. AVRELIO
COMMODO
IMP. CAES. AELI. HA
DRIANI. ANTONI
NI. AVG.PII.P.P. FILIO
COL. PAX IVLIA
D. D.
Q. PETRONIO.MATERNO
C.IVLIO IVLIANO
II. VIR
Bexae civitate Lusitaniae, ultra portam
Maurrensem ( ?), litera Bessali
CVRIAE. PONT.
FLAM. PACIS IVLIAE
VE. FLAM
J’ai envoyé à Mr Spanheim et Cuperus la copie de la dissertation de Mr le Dr Bon avec les sentiments de V. A. et verrai ce qu’ils me répondent. Voici encore un autre fragment d’inscription, et cela fair remarquer que par la prononciation vulgaire du pays le P. a été changé en B. et l’A. en E. touchant la ville de Bexa. Cela me fait souvenir de deux observations que j’ai fait par les médailles sur les prononciations. Il se trouve des médailles d’Auguste, où au lieu d’EMERITA il y a distinctement IMIRITA et IIMIIRITA, lequel changement provient sans doute de la langue espagnole,et je crois que l’E dans ce temps là se prononçait comme IE, et de semblables exemples se trouvent aussi dans les inscriptions dont il y a un mémorable exemple dans Gruterus, p. 741 D.M.I.M. VA IIRIANVS C. SIIXTILIO TIIRIIO O. PATRI. IIT. SIIXTIIVS VIIRVS P. BIINII MIIRIINTI. L’autre observation est sur les médailles de la famille POMPONIA, sur quoi j’ai écrit à un ami ce qui suit : Observavi in numis huius familiae, quod V in MVSA semper sic exprimatur V, annon inde conjicere licet, aliquem lateri vel denotari pronunciationem singularem, de qua re inde Gruterum pag. IX ubi notatur M. AVRELVS VRSVLVS et ( ?) omne dubium leg. debet :M. AVRELIVS, et lincola citerne L. imposita, literam I. significat, et L. sequitur, quibus observatis nascitum conjectura, in numis gentis Pomponiae propter impositam lineatam in voce MVSA, pronunciam debet Muisa, nam Miusa, non quadrat quia I. litera per lineolam notata in nomine M. Aur. Ursuli literam L sequitur ; idem videtur accidere pag. X ubit legitur : I. O. M. E. SALVT CELEAN et impositum I. necessario sequitur literam T seq. Quoddam dubiam praebet sequens vox, an nempe legi debeat CELEIAN vel CELLAIN. Quamis neatum intelligam ; quod pronunciatiorem votis MVSA, credo quod sien debeat, quasi Müsa, cum quidam augmentatione vel diminutione, nam dielecti variant. Pendant que j’écris cette lettre, je trouve dans Gruterus une inscription pag. 605, laquelle peut servir à cette observationsur MVSA : L. ACILI. EROTIS. ET / CISVITIAE MVSAE / OSSA. IN. VNO In alia inscriptione apud Gruterum p. 609, talis lineloa omnia verba feri sequitur sic Arn plurimis aliis. A cette question faite à cet ami il y en aurait encore quelques autres, que je prends la liberté d’ajouter ici. ACCOLEIA. Non fine ratione dubitatum, an in aversa parti nummi familiae hujus cognomen Lasifolus cognomen attribui debeat, vel peti a Laneibus, quia dicendum esset Lariciolus : forsan ergo metias reducitur a quodam qui Lares coluit, et forsam Lares huius familiae fuerint Nymphae, et quia haec numina in balneis colebantur, et in nummo caput balneatiois expressum est, forsan tres figurae illae in aversa parte Nymphas indicant, de qua (rie)endus Gruterus p. 93. ANTESTIA. In quibusdam huius familiae nummis cum praenomine C. Occurrit canis, nulli a ratio extat, cum canis addatur ; hinc in mentem venit, canis fuisse praenomen alicujus ex hac familia opera etiam cognomen fuit in aliis. ARRIA. Dubitatur de capite in nummo M. Arrii Secundi. Aversa vero pars hujus nummi explicam pols aucilio inscriptionum Gruteri pag. 390 et 1080, et inde encit ( ?) conjectura mea denotavi dona militaria. Vid Gruter p. 365 ubi de laio Arrio. AXIA. An vox NASO in tertio nummo huius familiae nocte, illam indicet, quaeritur, nam Harduino non satis emuncto naso ex hoc Naso vel Nasone efevit ( ?) exsulam Naxum, sed hoc non solum esse huius lepidia miraculum, nam in libro de nummis antiquis Popul. et Urbium p. 340 exlitens numeralibus potuit aedificare duas urbes, et pag. 249. Ex iisdem literis creavit Provinciam integram, plurimisque nummis addit solitum QVEM VEDIMVS, qui tamen nummis nunquam in rerumantura fuereunt, ut ex talibus ( ?) leo noscatur.MAECILIA. Quia in Grutero pag. 838 sid mentio cujusdem Naevij Asiliani, conjeri salem aliquem etiam extare in nummis gentis Maeciliae, de qua re jam scripsi Dno Gallando, sed ille non probavit, eroganda ergis est aliorum doctissimorum sententia. Reste à dire quelque chose sur les dessins que V. A. m’a fait la grâce d’envoyer. Le premier porte les mêmes noms, que les médailles de la famille Caecilia Tab. III, n° 1, 2, 3 et qui entrent aussi dans d’autres familles. Mais le très illustre ANT. CAPELLO me pardonnera si avec l’assurance de mes très humbles respects je doute de l’antiquité de son médaillon d’argent, et je crois qu’il est antique, mais fait à plaisir d’un côté par un ouvrier de notre temps. J’ai écrit àMr le Chevalier Fontaine pour avoir le quinaire de la famille Considia, et il m’écrit de Rome, qu’il n’a pu aller à Naples, à cause de la déclaration de la guerre. Pour les autres, je n’en puis dire autre chose, que je supplie V. A. très humblement de m’en envoyer les colles, pour en pouvoir juger avec plus de certitude. Au reste je suis et serai toujours avec un profond respect, de Votre Altesse, le très humble et très obéissant serviteur » (Paris, BnF, Manuscrits, Nouvelles acquisitions latines 389 : Correspondance numismatique d’André Morell d’Arnstatt, pendant les années 1702-1703, p. 85-93 [en ligne sur Gallica] ; Callataÿ 2015, p. 313, II.9).