-Lettre du 6 juillet 1696 (d'Arnstadt) : « Monsieur, le respect que j'ai pour une personne de vostre mérite est si grand, que je ne saurais vous oubliez quand je voudrais : je vous ai écrit un billet de Hollande par la voie de M. Graevius et je n'en vois aucun vestige de réception dans votre lettre. Si mon Specimen vous a plu, il plaira bien a d'autres, mais à vous dire le vrai, je n'en suis pas trop satisfait moi-même : j'écris aujourd'hui à M. Caen (?) à Rotterdam pour savoir ce que sont devenu les exemplaires que j'ay envoyé a mes amis de Paris il y a un an. Si l'abbé Bizot, à qui je les ai adressé, les a reçu, ils seront en purgatoire et il faudra les faire sortir par l'intercession de quelque Grand Saint. Les deux médailles de Polémon sont assurément de deux princes et sous deux Empereurs, si M. Vaillant soutient le contraire, c'est qu'il prétend conserver son infaillibilité, comme un Pape métallique. La médaille d'Asender d'or est très considérable, priez M. Rigord de m'en envoyer la colle, car j'en ay vu une a Nuremberg, où la teste ne ressemble point du tout a votre gravure : quant a Saturninus sur la médaille d'Antioche, je suis fort de vostre opinion que OUOLO ne peut être Volumnius l'intendant, deux magistrats si différents étant incompatibles sur une même médaille. Je trouve cependant la même difficulté pour le nom de Saturninus Volusius, parce que le nom de la famille se met toujours le premier, on dit Sentius Saturninus et non Saturninus Sentius etc. De plus comme la médaille est très fruste, à ce que j'en juge, il faut bien prendre garde que l'on ne prenne des apparences de lettres ou des lettres numérales pour un nom. Cependant si les lettres OUOLO se trouvent indubitablement, je crois qu'il faut lire SATVRNINUS VOLVSIANVS, pouvant se faire qu'il a été adopté par Volusien et ainsi ayant passé de la famille Sentia à celle de Volusien, Gouverneur de Syrie, a conservé son surnom de Saturninus, abolissant la famille Sentiæ et pour montrer qu'il entrait dans une autre, il a pris le nom d'adoption VOLVSIANVS, ainsi que cette terminaison était fort en usage pour ceux qui étaient adoptés : TREBONIANVS, POMPEIANVS, IVLIANVS, ANTONIANVS, AELIANVS, AVRELIANVS etc. Cependant, je vous prie, prenez, bien garde, peut-être que les lettres OU entre la tête et la palme ne sont que la terminaison de CATORNEIN OU, et qu'il n'y en a point en bas sous le bras gauche de l'Oronte, en ce cas le reste ne serait que l'époque, ETO. Vous me ferez un très sensible plaisir et service si vous m'envoyez une relation fidèle et circonstanciée touchant le Philosophe, car j'en suis sollicité par des amis qui me touchent et qui ont intérêt de la savoir au vrai. On a mieux fait de le condamner un souffleur en galère que de le pendre, car ce dernier malheur l'aurait empêché de souffler, au lieu que le premier lui en donne le moyen a force de ramer. Msgr. le Comte de Schwartzbourg augmente toujours son Cabinet en Grand Seigneur. Il a eu en ces jours passés entr'autres une médaille ΗΡΟΔΟΥ ΤΕΤΡΑΡΧΟΥ LΛΒ. Une palme etc ΤΙΒΕΡΙΑΣ dans une couronne, où Vous remarquez que cette médaille est pareille a une autre que feu M. Patin a vu in Thes. Mauroceno, p. 112 et que le P. Hardouin cite dans ses Herodiana, pag. 9, où il s'égaye fort en l'air sur la lecture de Patin qui est ridicule ΠΕΡΙΟΔΟΥ ΤΕΤΑΡΤ, pour montrer que Tiberias l'année quatrième de Tibere, et vous remarquerez cela dans son panégyrique, si jamais vous vous mettez après. Je ferai rendre fidèlement à M. Graevius les ports des lettres, c'est un très grand homme, qui m'a accablé d'honneur et de bienfaits à mon denier voyage d'Hollande. Le livre du P. Noris est achevé d'imprimer à Leipzig. M. Spanheim me mande qu'il est occupé aux index et préfaces sur Callimaque et Julien, ainsi nous verrons bientôt ces ouvrages-là, où assurément la sauce vaudra mieux que le poisson. L'on a aussi publié, L. Begeri, Thesaurum Brandburgicum, c'est le Thes. Palatinum habillé de neuf, il a cependant beaucoup de très belles additions. Un grand in-fol°. Souvenez Vous de me r'envoyer les listes du P. Hardouin. Conservez moi l'honneur de vostre amitié... » (Paris, BNF NAF 14823, f° 111 r-v, en ligne sur Gallica; Th. Sarmant 2000, p. 71, note 13, 2003, p. 117, note 27).