-Lettre du 28 février 1697 (d'Arnstadt) : « Monsieur, je vous écris la présente pour vous demander si vous ne seriez pas d'humeur de lier commerce de lettre avec Monsieur Leibnitz*, Conseiller de S.A. El. de Hanover et de la Sérénissime Maison de Brauschweig & Luneburg. C'est homme excellent vous doit être connu de réputation et par ses écrits. Il souhaiterait avoir un ami fidèle et généreux à Paris, pour s'entredemander ce qui passe en matière de lettres, livres et curiosités, offrait la réciproque pour ce qui se passe en Allemagne et autres lieux où il a une très vaste correspondance. S'il prend la liberté de vous écrire, je vous supplie de lui répondre suivant mon espérance et votre générosité ordinaire. Vous n'aurez que du plaisir d'une telle correspondance et qui ne vous sera point onéreuse, car les lettres vous seront livrées à Paris franches de port : on recevra de même les vôtres en indiquant une personne pour cela et j'espère que vous m'aurez obligation d'une telle connaissance. En mon particulier j'en serai ravi car vous me pouvez écrire surement par la même (sc. voie) et j'attendrai vostre réponse sur cette proposition. A cette occasion il faut que je vous importune touchant une véritable information sur la médaille de Zénodore le Tétrarque. Eumenius Pacatus (nb : Hardouin) qui suivant sa louable coutume se pare toujours des plumes d'autrui la rapporte comme de son cru dans ses Hérodiades, quoi que j'aie été le premier qui l'ait lue : j'en ay vu trois, l'une est chez le Roi : l'autre étoit chez Mr. de Seignelay et, apparemment, l'illustre Mr. Foucault la possède à l'heure qu'il est : la troisième est chez notre véritable ami et Nathanaël, Mr. Dron. La difficulté que j'y trouve est que sur deux colles que j'en ay je ne saurais déterrer la véritable lecture : outre cela j'en ai fait deux dessins, à l'un j'y ai mis L.ΒΝΣ à l'autre L.ΒΠΣ ainsi que Eum. P. la met. Au revers j'ai lu sur celle de Mr. Dron ΖΗΝΟΔΩΡΟΥ ΤΕΤΡΑΡΧΟΥ ΡΧΗ et sur celle de M. de Seignelay il y a quelques autres lettres, la-dite colle me semble montrer ΖΗΝΟΔΩΡΟΥ ΤΕΤΡΑΡΧΟΥ K CIARXH B mais je ne saurais accorder ces flûtes et je vous supplie d'examiner ces deux médailles exactement à votre accoutumé. Le Π de L.ΒΠΣ n'est pas fermé assurément en haut et il semble être L. ΒΜΣ. ou L.ΒΝΣ. Mais quand je lirais de cette manière le temps ne s'accorderait point, car ΒΜΣ revient au temps de Pompée ou Zénodore n'avait aucune part en sa tétrarchie étant possédée par Ptolemée Mennei, qui se racheta de Pompée pour mille talents, à ce que nous apprend Josèphe. Si ce n'est qu'on veuille supposer que Zénodore a voulu exprimer ce temps pour montrer l'époque et l'origine de sa tétrarchie, aussi la tête de la médaille semble, en quelque façon, être celle de Pompée**, à cause des cheveux élevés qui paraissent sur le front. Si je lis ΒΝΣ, cela revient à Jules César, où il n'était pas encor allé en Orient et Ptolemée Minei vivait encore n'étant mort que durant le temps de M. Antoine. Aussi la tête sur la médaille ne peut être de Jules César, à cause qu'il était chauve. Si je lis ΒΠΣ cela revient fort bien au règne de Zénodore, car ayant été fermier de Lysanias, fils de Ptolémée M. il en eut ensuite la tétrarchie et a vécu jusqu'a l'année A.V.C. 734 Apulejo et Silio Coss***. ainsi que nous pouvons voir dans Josèphe et Dion, dont le premier nous récite les particularités de sa mort s'étant tué à Antioche, après avoir voulu ruiner Hérode auprès d'Auguste par les députés ou accusateurs de Gadara. Et, je m'étonne que le Omniscius Eumenius Pacatus ait ignoré cela, ainsi qu'il parait dans ses Herodiades pag. 25****. L'inscription de l'autre côté de la médaille me fait de la peine car j'y lis ΖΗΝΟΔΩΡΟΥ ΤΕΤΡΑΡΧΟΥ K CIARXH B peut être se glorifie-t-il d'avoir été asiarque au sujet des jeux en l'honneur d'Auguste sur la bataille d'Actium et par là il a voulu flatter ce Prince, pour gagner sa bienveillance contre Hérode. Si j'avais la médaille je crois que je viendrais bien à bout de la déterrer entièrement, en confrontant les trois ensembles, car elles sont égales. Cette médaille est aussi chez l'Empereur l'ayant trouvée dans le grand recueil Mss de Strada ou elle est dessinée comme ci-joint. La première tête de ce dessin [DESSIN] et sur la médaille ne ressemble point à Auguste ainsi il est bon d'examiner tout exactement ce que j'espère de vostre bonté et que vous le feriez avec plaisir. S'il y a L. ΒΠΣ, assurément, il n'y aura rien à redire, mais le contraire me semble par la colle et qu'il y a ΒΜΣ ou ΒΝΣ. Enfin je serais ravi de déterrer au vrai le sens de cette médaille curieuse. Vous ne m'avez plus rien écrit sur l'affaire de Mesgrigny, qui est en Suisse et un de mes amis s'embarque avec lui. » (Paris, BNF NAF 14823, f° 113 r-v, en ligne sur Gallica ; Th. Sarmant 2003, p. 133, note 122).