-Letter of 6 March 1696 (from Deventer): "M. Morel me fait beaucoup d'honneur en louant le peu des belles choses qu'il a vues et copiées chez moy. Il me faisoit les même plaintes qu'il vous faict dans sa lettre, et il serait à souhaiter que les Maecenates se trouvassent en grand nombre partout. Je n'ai pas encore vu le Thésaurus Brandeburgicus de M. Begerus ; il y aura sans doute des rares médailles comme aussi dans le premier volume des médailles, grecques de M. Vaillant, qui va estre publié à ce que vous me mandez. Et à celle occasion, il faut que je vous fasse part que j'aye attrapé quelques médaillons et médailles où il y en a des fort rares ; et entr'autres un médaillon de L. Aelius Verus qui mérite d'estre mis dans le cabinet d'un Roy : il est très-bien fait et très-bien conservé, et l'on y voit le nom d'une ville de Pannonie qui s'appelloit CVRTA. Occo en a fait mention el après luy le comte Mezzobarbe, mais la description du revers n'est pas bonne; je crois que nostre amy le sçavant M. Vaillant ayt en vue cette médaille quand il met à la p. 71 du tome I de ses Numismata Impp. R. « Eiusdem est [fol. 235] farinae (vel novae fabricae) alter ab Occone relates p. 63 cum depravata épigraphe », et que le P. Hardouin ait esté du même sentiment parce qu'il ne fait pas mention de cette ville dans le livre de Nummis Popul. et Urbium. Mais mon médaillon prouve le contraire et la légende en est bonne: Pannonioe Curta AEl. Le nom de cette ville se trouve dans Ptolémée et dans l'Itinéraire d'Antonin: elle a eu sans doute le surnom d'Aelia de L. Aelius Verus, qui fut envoié par Hadrien dans la Pannonie: « cui provinciae non defuit, nam bene gestis rébus vel potius féliciter, et si non summi, medii tamen ducis obtinuit famam », et Pannonia se voit aussi sur ses médailles. Les scavans de Leipzig m'ont appris que Mess. Rigord et Graverol ayent expliqué une médaille grecque qui porte le nom du Dieu Pan; ils ont asseurément publié des fort belles remarques. Mais je ne puis nullement comprendre pourquoy le nom du Dieu Pan soit mis à l'entour d'une teste de la déesse Isis. Écoutez, je vous en prie, ce qui m'est venu dans l'esprit : je n'en veux pas estre garand moy-même, encore moins vous obliger à me croire, mais la chose mérite d'estre examinée. Je me suis donc imaginé que la légende de cette médaille pourrait estre Theou panos, c'est à dire pantos, Deae universi. [...] Dans les familles romaines d'Orsin, il y a le mot Hémis, d'où l'on doit faire Thèmis vel Thémis, comme un de nos sçavans a fort bien remarqué, et c'est ainsi qu'on lit dans une inscription publiée par Reinesius Partheniano et dans une autre PAREN, ca-d- parentibus. Voila, Monsieur, les rêveries qui me sont venues dans l'esprit à l'occasion des livres des médailles, et je vous prie de les vouloir examiner comme je prie aussi le possesseur de cette médaille grecque de vouloir attentivement considérer si ce mot ne soit pas fait de cette manière pantos. Le médaillon dont vous me parlez dans votre dernière lettre est d'une rareté extraordinaire, s'il n'est pas contrefait. Car il est certain qu'en l'an 161 de nostre grand Sauveur, Marc-Aurèle ait esté consul pour la troisième et L. Àurelius pour la seconde fois, comme S. E. le Cardinal Noris promue par une inscription de Gruter à la page 95 de sa Lettre consulaire, et à son exemple le scavant P. Pagi à la p. 53 de sa critique sur Baronius"; "Ce passage justifie donc la légende de cette médaille autant que M. Aurèle et L. Verus aient été consuls ensemble, ce qui ne s'est pas fait qu'à l'année 161. [235 v.] Mais le nombre ne convienl pas, et si ce médaillon est authentique, il n'y a qu'à dire que peut-eslre le temps ait effacé une ligne du nombre ou que les monétaires y aient mis par abus II pour III. Car il est constant, etAvous le prouvez bien, que M. Aurèle ait esté consul pour la troisième et L. Verus tous deux Augustes pour la deuxième fois à l'année de N. S. 161" "Les sçavans ont fort bien remarqué qu'on y met deux consulats au lieu d'un, mais il me semble pourtant que le to deuteron et le to b soit applicable à M. Aurèle et L. Verus, et que cet autheur ait escrit qu'ils aient esté en cette année consuls pour la deuxième fois : ce que je vous prie de vouloir examiner, car ce serait d'un grand poids pour expliquer le médaillon du P. Roubaud dominicain." (Pélissier 1902-1905 (1905), Lettre XI, p. 47-50, 52).