Lettre s. d. s. l. : Lettre de Mr. L’Abbé Barthélemi, garde des médailles du roi, à M. l’Abbé Audibert, in Audibert, Dissertation sur les origines de Toulouse, Avignon, 1764, p. 14 et sv. – sur des monnaies trouvées à Vieille-Toulouse :« Vous m’avez fait l’honneur, monsieur, de me demander quelques éclaircissements surles médailles découvertes à Vieille-Toulouse; c’est avec une peine secrète que je vais tâcher de répondre à votre confiance. La plupart de ces médailles ont été publiées par divers antiquaires qui n’ont rien laissé à désirer sur les unes, et qui ne pouvaient proposer que des doutes à l’égard des autres. Il faudrait donc copier servilement ce qu’ils ont dit, ce qui est assez inutile, ou substituer de nouvelles conjectures aux leurs, ce qui l’est encore davantage. Cependant, pour seconder vos vues, j’ai jeté sur le papier quelques notes superficielles dont vous ferez l’usage que vous jugerez à propos. Médaille phénicienne. N°. 1°. Cette médaille assez commune, déjà publiée par Le Clerc et par d’autres savants, représente d’un côté une figure debout, et de l’autre une inscription phénicienne. On ignore et le pays où elle fut frappée, et la signification des mots phéniciens tracés au revers. Vous avez découvert la vôtre à Vieille-Toulouse, celle de Le Clerc avait été trouvée dans l’Andalousie. Suivant l’auteur d’une explication que ce critique a insérée dans son journal, la médaille fut frappée à Serpa, ville de la Bétique, et sa légende signifie : le Soleil aime Serpa. Une si bizarre interprétation n’a besoin que d’être rapportée. Si je voulais lui en substituer une autre, je dirais que les deux premières lettres phéniciennes paraissent signifier une Isle, et que les trois suivantes sont peut-être le nom de Majorque. Mais pour justifier cette leçon, il faudrait analyser l’inscription, et m’engager dans des détails qui nous ennuieraient l’un et l’autre. Médailles espagnoles. N°. 2. Toutes les médailles de cette espèce que vous avez découvertes à Vieille-Toulouse représentent ces caractères que Don Velasquez désigne sous le nom de Celtibériens, et dont il a donné un alphabet en 1752. Le peuple qui s’en servait était assez voisin de Toulouse pour avoir des liaisons de commerce avec cette ville. Médailles gauloises. N°. 3. La tête est inconnue; la croix du revers est une suite de l’ancienne manière de fabriquer la monnaie ; la hache qui paraît dans un des angles est représentée sur presque toutes les médailles en argent découvertes à Vieille-Toulouse, et s’y trouve accompagnée de plusieurs symboles différents, comme de couronnes, de bracelets, etc. N°. 4- Autre médaille gauloise fort semblable à certaines petites médailles de Marseille, mais qu’il faut attribuer aux anciens habitants de Toulouse, à cause de la hache que nous offre le revers. Suivant les apparences, les divers peuples des Gaules caractérisaient leurs monnaies par des symboles que nous ne pouvons pas déterminer encore, parce que les antiquaires ont trop négligé de connaître et d’indiquer les lieux où l’on trouve ces monuments. Les médailles gauloises en bronze représentent au revers tantôt un aigle, tantôt des figures grossièrement dessinées, et d’autres fois de simples ornements. Elles semblent postérieures à celles d’argent, et peut-être viennent-elles pour la plupart des autres peuples des Gaules. Il en est deux très connues des antiquaires, l’une est des Volces Arécomiques, et l’autre de la ville de Reims, avec le mot REMO au-dessous d’un char. Médailles grecques. Parmi les médailles grecques, je ne parlerai point de celles de Marseille, qui sont fort communes, ni d’une médaille d’Aradus en Phénicie, qui ne l’est guère moins. Mais celles des numéros 5 et 6 méritent quelque attention. Elles représentent d’un côté la tête de Mercure, caractérisée par le caducée, et de l’autre un trépied autour duquel est ce mot АΟГГΟΣΤΤААΗΤΩΝ, nom d’un peuple inconnu. Le P. Hardouin, qui en publia une semblable du cabinet du roi, ne pouvant éclaircir la légende, proposa de la corriger, et ne donna que de vaines conjectures. L’auteur d’un excellent ouvrage qui vient de paraître attribue le monument aux habitants de Talet en Laconie, et l’on ne pouvait rien dire jusqu’ici de plus vraisemblable. Mais les découvertes faites à Vieille-Toulouse élèvent des doutes contre cette explication,1°. Les médailles dont il s’agit ici s’y trouvent en si grande quantité, qu’on ne peut guère supposer qu’elles y soient venues de la Grèce, et surtout d’un canton aussi éloigné des routes générales du commerce que l’endroit où le Talet était situé. 2°. Quelques unes de ces médailles sont d’un mauvais travail, et ressemblent pour la fabrique aux médailles grecques de Béziers et à ces médailles que la plupart des antiquaires attribuent à des rois de Galatie, et que d’autres rapportent peut-être avecplus de raison à des rois des Auvergnats.3°. On y voit quelquefois des noms qui ne paraissent pas grecs d’origine, tel est celui deBuxies ou Bwxpes que je trouve sur une médaille du cabinet du roi. Tel est celui de ΑΟγΚτι ou ΑΟγΚτιΩΝ que l’on voit sur la médaille gravée dans la planche suivante n°. 6. J’ignore si le peuple à qui nous devons ce monument, faisait partie des Gaulois Tectosages établis à Toulouse : s’il faut le compter parmi ces peuplades obscures de l’Aquitaine que Strabon cite sans les nommer ; si on pourrait le placer sur les bords de la Méditerranée et sur les rivages de Leucate dont le nom a beaucoup de rapport avec celui que semble présenter la médaille. Mais on doit présumer d’une part, qu’il avait des relations intimes avec les anciens habitants de Toulouse, et d’une autre, qu’il avait reçu l’usage de la langue grecque ou de Marseille, ou de quelqu’une des colonies de cette ville » (voir : http://www.vieille-toulouse.fr/IMG/pdf/Audibert.pdf; voir aussi Giard 1995, p. 173).