Lettre du 28 octobre 1627 (d’Aix-en-Provence, à Rome): "J’ai reçu vostre lettre du dernier de septembre ensemble les deux médailles de Titus et de Commodus que Mr Aubery y avait jointes dont je vous ai bien de l’obligation. Quant aux médailles, puisque le sr Lud. Compagno faisant le rencheri de son Domitius Domitianus, il le lui faut laisser. Il est vrai qu’il m’en a autrefois envoyé une empreinte, dont je luy ai de l’obligation. Quand je voyais qu’il vous vendait de ses pièces, je croyais qu'il ne fit pas plus de difficulté de vendre les unes que les autres. Si vous faites le voyage de Naples, enquérez vous que sont devenues les médailles du feu sr Pietro Ant° Guiberti autrefois vicaire général du cardinal Aquaviva, archevêque dudit Naples. Il avaitt un Domitius Domitianus meilleur à mon gré que celui du sr Lud. Compagno. Vous essayerez si vous le pourriez arracher des mains des héritiers à quelque prix tolérable. Ce que vous me dites du FL. NEPOTIANVS CONSTANTINVS AVB. n’est pas à mépriser. Si la médaille n’est à vendre, voyez que nous en ayons une empreinte à votre commodité. J’admire l’humeur de ces Messieurs Godefridi de s’être faits tant prier pour vous montrer si peu de chose. Toutefois je ne sais si ce n’est pas par mégarde que vous avez écrit NIGRIANO pour NIGRINIANO, car l’un serait bien différent de l’autre, et mériterait d’être plus estimé de beaucoup, le Nigrinianus étant fort commun, et l’autre m’étant du tout inconnu. J’ai pris plaisir au dessin de la médaille de Septimus Severus avec la couronne rayonnée, et en eusse bien pris davantage, s’il y eut eu moyen d’en avoir l’empreinte pour déchiffrer l’inscription, laquelle est si corrompue sur le dessin que le meilleur y est du tout inexplicable. J’ai vu fort volontiers votre Commode avec la tête du Lunus et sa tiare étoilée, en quoi vous avez bien rencontré pour mon goût. Car toutes ces tiares me plaisent, mais principalement celles qui sont plates par dessus plus que les rondes et que les pointues. C’est dommage que le Titus ne soit un peu plus net comme vous dites, mais encore le trouve je bien gentil. Mr Aubery ne m’a pas envoyé le poids de l’astragale, mais je ne laisse pas de vous en être auss obligé que si je l’avois reçu. Il est trop gros pour mettre dans une lettre. Mais soit que vous recouvriez les colonies que vous pourchassiez ou non, qu’il ne tienne point à cela, je vous prie, que nous ne voyions un inventaire exact de tout ce que vous avez de cette nature. Si vous trouvez Mgr le cardinal Boncompagno en bonne disposition de vous laisser prendre quelques empreintes, n’oubliez pas celles de caractères barbares, et principalement où il y aura des tiares et diadèmes et cherchez si vous n’y rencontreriez point une petite médaille de cuivre de moyenne grandeur fort nette ayant son vernis fort vert et conservé, où étoit l'image d’un roi et l’inscription ΒΑΣΙΛΕΥΣ ΚΟΤΥΣ. Elle était mince et je vous cotte cette qualité, d’autant qu’il s’en trouve quantité qui ont de pareils noms de roys, mais fort épaisses, fort golfes et fort confuses. Et celle là était de bonne main. Je voudrais bien en avoir une empreinte si faire se pouvait, et en aurais bien de l’obligation à ce grand cardinal s’il daignait m’en faire la grâce, aussi bien que des empreintes des couronnes ornées de têtes, en revanche de quoi je lui pourrais fournir quelque chose de ce même sujet qui ne serait possible pas hors de son goût. Je suis étonné qu’on ait laissé perdre là l’invention de blanchir ou nettoyer les médailles d’argent si proprement comme faisait le feu sieur Pasqualin. Je crois que l’invention ou la façon se trouverait par écrit entre les mémoires du feu sr Lelio Pasqualini, et que si ledit seigneur Cardinal la faisait demander à son héritier, on la lui communiquerait. Ce sera dommage si on la laisse perdre tout à fait. J’ai entendu volontiers que les deux médailles consulaires que m’avez envoyées soient venues du cabinet du feu sr Natalitio Benedetti. Je voudrais bien savoir en quelles mains est tombé tout son cabinet et vous remercie de l’usage de la limaille d’acier. J’ai peine de croire que le dragon qu’avez donné à Mgr le cardinal Barberin soit véritablement un serpent ailé. Je vous prie de m’en faire un peu de description exacte à votre loisir. Il me reste à vous dire que si Mr de Thou persiste en son dessein de voyage du Levant, et qu’il ne soit encore en chemin, vous devriez pratiquer de l’accompagner, car vous y découvririez des merveilles, avec la connaissance que vous avez de l’antiquité, soit en médailles grecques ou de colonies et étrangères, soit en gravures et inscriptions antiques, et y acquerriez de grandes connaissances de ces pays qui ont été autrefois les délices du monde" (Bibliothèque de l’Ecole de Médecine de Montpellier, Ms. H, 271, fol. 38; Tamizey de Larroque 1894 vol. 5, lettre XVIII, p. 535-538; Molinari 2004, p. 123, note 8).